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Des fourmis dans les ailes
Des fourmis dans les ailes
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22 mai 2006

Vous avez dit turbulences ?

Samedi matin, j'ouvre un œil, puis la fenêtre. Bon, ben c'est pas aujourd'hui que je vais voler. Pluie continue, rafales de vent, ciel couvert. Je prends mon petit déjeuner, retourne à la fenêtre. Le plafond est haut quand même, et le vent, dans ma vallée ça ne veut pas dire grand chose. Allez, zou, on y va quand même, on verra bien, et là, ça fait trop longtemps que je n'ai pas volé.

Faut dire que depuis que je sais que je suis "lâchable", la météo et ma faible disponibilité ont fait que je ne suis toujours pas lâché. Et aujourd'hui, ça risque pas ! Direction le terrain, donc, sous une pluie continue et sous des bourrasques musclées. Bon, moi je ne suis qu'un apprenti pilotaillon, certainement pas suffisamment qualifié pour savoir si c'est volable ou non.

Arrivé au terrain, je sors la météo. 15 nœuds plein sud, ce sera donc la 15 en service. Le plafond est effectivement haut, les terrains alentour ont des conditions identiques. La TEMSI par contre me donne quelques doutes. Turbulences à turbulences sévères de la surface jusque 6000 pieds, un front froid qui nous déboule dessus, et pour les vents, ça devrait tourner sud ouest dans la matinée.

Mon instructeur arrive, on jette un œil au ciel et à la manche à air... "Ca m'a l'air volable tout ça, et puis, ça te fera une bonne révision, on va voir s'il y a vraiment un pilote dans l'avion !", le tout dit avec un petit air gourmand et malicieux.

Bien, prévol, on sort l'avion, petit briefing, roulage. J'ai du mal à diriger l'avion au sol. "Tiens, regarde, le vent a tourné, il est sud-ouest maintenant, je crois que tu vas t'amuser !". Essais moteur, alignement. Le vent varie de sud à sud-ouest, et la manche à air oscille entre 15 et 20 nœuds. Lâcher des freins et mise en puissance. Le DR400 accélère doucement, je rame un peu pour le conserver en ligne. Rotation. Immédiatement le nez pointe sur la droite. On grimpe doucement, et j'entame la branche vent traversier qui est devenue par la force des choses une presque vent de face. On peine a remonter le vent, virage en vent-arrière-presque-traversier. La correction de dérive à l'altitude de circuit atteint quinze à vingt degrés. On remonte la piste à une vitesse sol impressionnante, l'éloignement dure vingt secondes de moins que d'habitude, et en base je prends un taux de descente peu académique car elle va être très courte avec ce vent qui me pousse !

Un seul cran de volet et vitesse d'approche majorée à 140 km/h. On se fait tabasser sérieusement, mais je garde le plan et l'axe. Vu la vitesse, le palier de décélération dure une éternité. Je me bats contre les rafales, je décrabe, on touche de la roue droite, on pose. Commentaire de l'instructeur : "bien vu, on en refait un !".

La manche à air est à l'autre bout de la piste, et je n'ai aucune idée du vent. Gaz, rotation. L'avion s'élève d'une dizaine de mètres et le badin se stabilise autour de 130 sans vouloir monter plus haut. Pourtant, je vois clairement que la vitesse sol augmente. "N'augmente pas l'assiette, laisse le accélérer !". On passe la manche à air qui nous confirme que la rafale nous pousse dans le dos. D'un coup le vent a de nouveau une composante de face et le badin s'envole à 160 ce qui nous fait monter avec un vario de chasseur. J'entends un rire dans le casque : "Ca y est ? Tu l'as retrouvé le bouton de la post-combustion ?".

On refait donc un tour. Le vent a forci et est carrément sud-ouest maintenant. La correction de dérive atteint vingt-cinq degrés en vent arrière. Dans les turbulences, je comprends pourquoi on parle d'assiette moyenne ! L'aiguille du badin danse la gigue dans les rafales, et j'ai un peu perdu mes repères. C'est vrai qu'il est assez inhabituel de devoir se retourner pour voir le point d'aboutissement en vent arrière.  L'atterrissage est sportif, mais bien maîtrisé. "Allez, enlève la réchauffe, on y retourne".

On est sévèrement secoué au décollage et dans la montée. Le circuit se déroule aussi bien que possible dans ces conditions jusqu'en début de finale, où une turbulence violente soulève l'aile gauche. "Les gaz !". Je pousse la manette à fond, revient à une inclinaison nulle. On est descendu sous le plan, bien à droite de l'axe. "Allez, corrige moi ça, et garde 150 en courte". Je ramène l'avion sur le plan et dans l'axe. "C'est stabilisé, on continue". On pose, et je freine l'avion. "Tu veux arrêter ?". Les trois tours m'ont épuisé, et je ne me sens pas d'en refaire un. "Tiens, vas-y, prend les commandes, et fait moi voir comment c'est un vrai pilote !".

La grande différence que j'ai pu noter entre son pilotage et le mien, c'est qu'il avait un grand sourire de bonheur pendant qu'on  se faisait chahuter, et qu'il tenait le manche du bout des doigts, très détendu !

C'est pour l'instant mon vol le plus court, mais certainement aussi le plus formateur. Ces trois atterrissages ont probablement été mes plus réussis, si on excepte que le toucher s'est fait loin loin loin des plots. Mais ça va, on a de la marge ! Si je dois me souvenir d'une chose, c'est la vitesse qui nous sauve dans ces conditions, et que la fameuse réserve kVe qui m'avait semblé si ésotérique lors de la leçon théorique a trouvé ici toute son utilité.

La seconde leçon de ce vol, c'est que vraiment, manche dans le vent et pied contraire, dans ces conditions c'est très confortable et très précis !

La troisième, c'est que l'avion tient en l'air tout seul, et que ce n'est pas la peine de se cramponner au manche pour l'aider !

Et enfin, que par 20 nœuds, le nettoyage de l'avion est simplifié car les moustiques, eux, sont hors limitation !

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